Malheureusement, la navigation aérienne
est encore loin d'être accessible à toutes les
bourses, mêmes à celles quelque peu garnies, a
dit un de nos aviateurs les plus populaires, « il ne
faut pas songer à voler si l'on n'a pas à sa
disposition un minimum de 26000 francs, et le mieux, a-t-il
ajouté, serait d'être en mesure de pouvoir
dépenser le double ». D'abord, il en coûte beaucoup plus cher
pour acquérir les connaissances nécessaires
pour bien diriger un aéroplane que pour apprendre
à conduite une voiturette automobile. Le prix
ordinaire des leçons oscille aux environs de 2600
francs. Il faut, en outre, déposer 1260francs en
prévision des détériorations que
pourraient subir l'appareil au cours de l'apprentissage, et
on peut se considérer comme un protégé
des dieux quand on entre en possession, même d'une
partie de cette somme. Enfin, on paie une prime de 260
francs à une société d'assurance contre
les accidents de personnes. Ajoutons à ces divers versements, les
frais de voyage, nourriture, logement, les pourboires,
etc..., de telle sorte que pour obtenir le brevet de pilote,
il est nécessaire d'avoir en sa possession au moins
6000 francs.n style="margin-left:73px" Dûment nanti du brevet de pilote, il
espensable, si vous voulez accomplir quelques prouesses, que
vous fassiez l'acquisition d'un aéroplane. Le moindre
monoplan coûte au bas mot 12000 francs. Ce genre
d'appareils est plus difficile à manier que le
biplan, mais ce dernier est d'un prix beaucoup plus
élevé. Un aéroplane biplan semblable
à celui qui a servi à Paulhan pour son beau
vol de de Londres à Manchester et aussi au Lieutenant
Cammerman pour accomplir ses fameux raids, vous reviendra
à 26000 francs. Le biplan Farman est vendu 28000
francs. Par contre, le monoplan Blériot, sur lequel
Leblanc et Aubrun ont bouclé le Circuit de l'Est, ne
revient guère à plus de 12600
francs. Une fois en possession d'un appareil, quel qui
soit, il vous faut un champ d'expérience, autrement
dit, un champ d'aviation au-dessus duquel vous continuerez
l'entraînement. Ce terrain, abrité du vent le
plus possible, devra avoir une superficie de quatre
hectares. Vous n'avez évidemment pas besoin de
l'acheter, mais encore êtes-vous obligé d'en
payer la location. Sur ce champ d'aviation, vous ferez
ériger un vaste hangar pour remiser l'appareil; cette
construction vous reviendra à environ 2600 francs.
Et, si le hangar est convenablement agencé, avec un
sol bitumé et l'adjonction d'un atelier de
réparations, très utile, sinon indispensable,
elle atteindra facilement 7600 francs. Puis, vient la question des petits accidents :
bris de fils, cassage de bois, moteur, etc...il vous sera
difficile de vous en tirer à moins de 25 à 60
francs à chaque fois, et s'il survient un accident
plus grave, il faudra tout de suite compter un billet de
mille francs. A lui tout seul, le tissu caoutchouté
qui recouvre la fragile charpente revient à environ
1600 francs. Quant aux dépenses pendant le vol, c'est
une quantité quasi négligeable puisque, avec
quatre litres et demi d'essence et deux litres d'huile de
ricin, c'est à dire pour à peu près
quatre francs, on eut parcourir une quinzaine de
kilomètres dans les airs. Cet exposé, rigoureusement exact,
causera peut-être une certaine désillusion aux
personnes que les lauriers des premiers hommes volants
empêchent de dormir et qui rêvent de les
imiter. D'ailleurs, les difficultés
matérielles ne sont pas les seules auxquelles se
heurtent les adeptes de l'aviation ; il en est d'autres
purement physiques, qui ne sont pas non plus à
dédaigner. |